Joseph-Ignace GUILLOTIN
1738-1814
Médecin et homme politique français
co-inventeur de la “guillotine”

 

Praticien réputé il fut attaché aux services de Monsieur, frère du roi, Comte de Provence. Érudit et cultivé il fréquente les cercles, côtoye des savants comme Buffon ou Lacépède, ou des écrivains comme Condorcet ou Voltaire.

Né à Saintes le 28 mai 1738, fils d'un avocat girondin, Joseph-Ignace Guillotin fut quelques temps élève des jésuites puis, abandonna la soutane pour la médecine.

Il étudie à Paris, devient médecin-régent et enseigne l’anatomie, la physiologie et la pathologie à la Faculté de Médecine de Paris. En 1784 Guillotin est membre de la Commission Royale d’enquête sur le magnétisme animal qui avait été initié par Mesmer. et à ce titre condamne le magnétisme animal pour raison d’immoralité publique.

En décembre 1788, il participe à la rédaction de la Pétition des citoyens domiciliés à Paris réclamant le vote par tête et non par ordre aux États généraux et un nombre de députés du Tiers au moins égal à ceux réunis de la Noblesse et du Clergé, cette pétition se prononce également pour la liberté de la presse.

Élu député de Paris aux États généraux le 2 mai 1789, en même temps que l’abbé Joseph Sieyès et Jean-Sylvain Bailly, il est nommé secrétaire de l’Assemblée nationale constituante (juin 1789-octobre 1791).

Une des questions d’actualité débattue fut celle de la peine de mort dont le Docteur Cabanis disait qu’elle est “Un grand crime social qui, suivant moi, n’en prévient aucun.”

1789

Soucieux des problèmes que pose la peine capitale, Joseph-Ignace Guillotin propose le 28 novembre 1789 à l’Assemblée Constituante, avec l’appui de Mirabeau, l’usage d’une machine à décapiter; son but est d’humaniser l’exécution des Hautes Oeuvres et à rendre les mises à mort de criminels moins barbares et d’écourter autant que possible leur souffrance. Il arrivait en effet à l’époque que les exécutions traînent en longueur.

1791

LLe 1er juin 1791, l’Assemblée repousse la proposition de Maximilien Robespierre, du 30 mai 1791, qui souhaitait abolir la peine capitale. .
En effet, jusqu’au milieu du XVIII ème siècle la décapitation au sabre était réservée aux nobles et aux gens de qualité, le voleur de grand chemin était roué en place publique, le régicide et le criminel d’État étaient écartelés, le faux-monnayeur était bouilli vif dans un chaudron, l’hérétique était brûlé, le domestique voleur était pendu…
En juin 1791 dans un souci d’égalité pénale des condamnés à mort, Guillotin propose un projet de réforme du droit pénal dans lequel le premier article stipule un mode d’exécution unique quelque soit le rang et l’état du coupable, par “l’effet d’une simple mécanique.”
Le 6 octobre 1791, la Loi rappelle que la torture qui précède un procès est interdite décide à la demande de Le Pelletier de Saint-Fargeau que “tout condamné à mort aura la tête tranchée”(article 3 du Code civil).
L’Assemblée confie au docteur Antoine Louis, membre de l’Académie de Médecine la mission de mettre au point l’instrument.
Le “grand rasoir national” est né en effet d’un côté des réflexions politiques, philosophiques et humanitaires de Joseph-Ignace Guillotin, Docteur Régent de la Faculté de Médecine de Paris,et par ailleurs des réflexions anatomiques et techniques de Antoine Louis, secrétaire de l’Académie de Chirurgie et de Médecine de sa Majesté, qui dans un but d’humanité ont voulu rendre la mort plus douce, sans penser que dans le même temps ils la rendraient plus facile.

1792

La guillotine pendant la période révolutionnaire. L’instrument pèse 580 kg, dont 40 kg pour l’ensemble mouton-couperet (qui se répartit de la façon suivante: 30kg de poids mort, 7kg pour le couperet et 3 boulons de 1 kg chacun)
La hauteur des montants est de 4,50 m et la chute du couperet se fait sur une hauteur de 2,25 m.
Nombre, lieux d’exécutions et victimes:
Le nombre de guillotines est fixé par décret du 25 prairial an I (13 juin 1793) : une machine à trancher par département.
Lieux d’exécutions à Paris:
Place de Grève
Place du Carrousel
Champ de Mars
Place de la Révolution (aujourd’hui Place de la Concorde)
Place Saint Antoine (aujourd’hui Place de la Bastille)
Barrière du trône renversé (aujourd’hui Place de la Nation)

En s’inspirant de gravures de machines anciennes déjà utilisées en Italie, en Angleterre et en Écosse dès le XIIème siècle, Antoine Louis conçoit une machine placée sur un échafaud, fait fabriquer un prototype par un artisan facteur de pianos, nommé Tobias Schmidt assisté de l’exécuteur Charles Sanson.
Le 25 mars 1792 Louis XVI signe la loi faisant adopter la machine à trancher la tête des condamnés.
La machine est expérimentée “in anima vili” (sur des moutons) et sur 3 cadavres, dans la cour de l’hôpital Bicêtre, le 17 avril 1792. Le couperet en forme de croissant est modifié par le docteur Louis en un couperet en forme de trapèze au tranchant oblique;
Dans un compte rendu à l’Assemblée (du 7 mars 1792), le docteur Louis justifie son choix technique:
“En considérant la structure du cou, dont la colonne vertébrale est le centre, composé de plusieurs os dont la connexion forme des enchevauchures de manière qu’il n’y a pas de joint à chercher, il n’est pas possible d’être assuré d’une prompte et parfaite séparation en la confiant à un agent susceptible de varier en adresse par des causes morales et physiques; il faut nécessairement pour la certitude du procédé, qu’il dépende de moyens mécaniques invariables dont on puisse également déterminer la force et l’effet.”
De cette collaboration est né l’horrible instrument que l’on surnommera d’abord “la Louison” ou “la Louisette” enfin malgré les protestations de son inventeur “la Guillotine”, mais également la “Veuve” par les escrocs ou "la Bécane" par les exécuteurs, qui se dressera dorénavant partout en France pendant toute la période de la Terreur avant de laisser sa place au Directoire et au jeune général corse Bonaparte qui se chargea de repousser l’envahisseur et de reconstituer le pays ruiné par la Révolution.
Le 24 juillet 1792, le ministre de l’Intérieur refusera d’accorder un brevet de fabrication à Tobias Schmidt.

1793-1794

 

Victimes guillotinées pendant la période révolutionnaire
1792 Le 25 avril 1792, une foule considérable se presse vers la place de Grève à Paris pour assister à la première décapitation mécanique, celle d’un voleur avec violence appelé Nicolas-Jacques Pelletier dont la condamnation avait été prononcée le 24 janvier 1792. La foule, déçue de voir avec quelle rapidité et efficacité se passe l’exécution, hua le bourreau.
Le 21 août 1792 eut lieu la première exécution d’un condamné politique: Louis-David Collenot d’Angremont.
1793-1794 Pendant la période de la Terreur qui dura de septembre 1793 à juillet 1794, environ 50 guillotines furent installées en France, fonctionnant parfois jusqu’à 6 heures par jour à Paris pendant les mois de juin et juillet 1794.
On estime à plus de 19.000, le nombre des guillotinés, à Paris, pendant cette période.
On estime à 42.000, le nombre des guillotinés, en Province pendant la même période.
21 janvier 1793: Après son procès et sa condamnation à mort (le décompte nominal des votes suscite encore aujourd’hui des controverses), le transfert de Louis XVI se fit Place de la Révolution, car l’emplacement de cette place ouverte semblait moins risquée que la place du Carrousel, fermée et plus étroite. Le roi fut décapité à 1O h 22 sur l’échafaud dressé entre la statue de Louis XV et l’avenue des Champs-Elysées.
Le bourreau qui exécuta Louis XVI s’appelait Charles-Henri Sanson dit le Grand (1739-1806), il faisait partie d’une dynastie de bourreau qui officia de 1688 à 1847.
Le cadavre du roi fut transporté à l’ancienne église de la Madeleine et après l’office, enterré dans une fosse sur un lit de chaux au cimetière de la Madeleine. Le corps fut exhumé le 19 janvier 1815 et transporté à Saint Denis.
16 octobre 1793: condamnée à mort à 4 heures, la reine Marie-Antoinette fut exécutée à 12 heures 15 Place de la Révolution (ensevelie à côté de Louis XVI au cimetière de la Madeleine), le corps fut exhumé le 18 janvier 1815 et transporté à Saint Denis.
6 novembre 1793: Jugement et exécution de Philippe Égalité (Duc d’ Orléans), dans la journée. Renié à la fois par les royalistes et par les tenants du pouvoir révolutionnaire. Élu député de la noblesse, il s’était joint aux délibérations du Tiers. Il reçut de la Commune de Paris le nom d’Égalité. Élu député de Paris à la Convention. Il vota l’abolition de la royauté et le châtiment capital au procès de Louis XVI dont il était le cousin. Il sera favorable à la création du Tribunal révolutionnaire le 10 mars 1793 qui le condamnera quelques mois plus tard.
10 mai 1794: Exécution de Elisabeth-Philippe-Marie-Hélène de Bourbon, soeur du roi.
Le Dauphin Louis XVII, serait mort au Temple le 08-06-1795, après trois ans d’enfermement, il était âgé de 10 ans et 3 mois.

Pendant la période de la Terreur qui dura de septembre 1793 à juillet 1794, environ 50 guillotines furent installées en France, fonctionnant jusqu’à 6 heures par jour à Paris pendant les mois de juin et juillet 1794. On estime à 19.639, le nombre des guillotinés pendant cette période.
1794 Dès 1794, un débat s’instaura entre médecins sur la question de savoir si la tête séparée du reste du corps perd immédiatement conscience après l’exécution?
Cabanis, Oelsmer, Sömmering et Suë eurent d’orageuses discussions pendant près d’une année, au cours de laquelle on ne sut pas comment exécuter un condamné.
- Selon certains “il est vraisemblable que la sensibilité peut durer un quart d’heure…Vu que la tête ne perd pas si tôt sa chaleur…et que si l’air circulait encore régulièrement par les organes de la voix, cette tête parlerait.”
- Selon d’autres (“Réflexions sur le supplice de la guillotine” de Suë), “la section de la moelle entraîne une disparition de la force vitale, du sentiment, de la personnalité et du moi.” et le "patient" (sic), selon Guillotin n’a même pas le temps de ressentir “une sensation de fraîcheur dans la nuque”

Au début de la Révolution française, l’Assemblée constituante avait consacré aux affaires médico-sociales le Comité de Mendicité dans lequel Joseph-Ignace Guillotin fut le seul médecin à siéger. Mais il n’arrive pas à contrebalancer l’énorme influence de Talleyrand et du duc de la Rochefoucauld-Liancourt. Il obtient cependant la création d’ un Comité de Salubrité chargé de la réorganisation de l’enseignement médical et des hôpitaux dont il fut le président, mais cette réforme n’aboutira pas. Le seul résultat sera l’instrument républicain des exécutions capitales.

En 1791, le Comité de Salubrité envoie dans les départements un questionnaire sur la question médicale. Les conclusions furent en faveur d’une fusion de l’enseignement de la médecine et de la chirurgie. Assuré de la collaboration de nombreux conseillers le Comité de Salubrité essaya de mettre sur pied un service de santé national organisé à l’échelle départemental, chaque département ayant ses propres médecins de districts et de cantons. La réforme des études médicales avait été l’objet de nombreux projets. Le plus cohérent était celui présenté, en 1790, par Vicq-d’Azyr au nom de la Société Royale de Médecine. Malgré tout les médecins passaient pour des aristocrates et des privilégiés de l’instruction. C’est dans cette ambiance que le décret du 2 mars 1791 autorisa n’importe quel citoyen à soigner son prochain.
Les médecins de l’Assemblée législative ne feront guère mieux que leurs collègues de l’assemblée précédente.

 

1795

Avec la loi du 4 brumaire an IV (26 octobre 1795) la Convention supprime la peine capitale “à dater du jour de la publication de la paix générale.” Le Consulat prorogera cette mesure par la loi du 4 nivose an X (25 décembre 1801).

De 1789 à 1815, les médecins ont été profondément mêlés à la vie politique nationale, pendant que leurs statuts professionnel et social subissaient d’importants changements.
Le 15 décembre 1793, la Convention Nationale, sous prétexte d’égalité, ferma toutes les Facultés de France et proclama la liberté de toutes les professions. A la Convention A. de Fourcroy fait adopter le décret du 14 frimaire an III (1794) qui réglemente les études médicales mais non leur sanction et laisse les professions médico-pharmaceutiques dans le chaos. Le danger était tel que Guillotin se joignit à Cabanis, Pinel et Fourcroy pour obtenir le rétablissement des Écoles de Santé dès 1794.

L’idéologie sociale irraisonnée de l’époque provoqua une crise au sein de la médecine hospitalière au profit d’une médecine libérale dans laquelle des individus mal formés distribuaient des soins inconsidérés.
Emprisonné sous la Terreur (Septembre 1793 à juillet 1794), le docteur Guillotin faillit connaître le châtiment dont il avait prôné l’emploi. Relâché après Thermidor il se retire de la vie politique.
Il poursuit ses recherches en médecine. Il fut un des plus importants membres du Comité de Vaccine ainsi que de la Société pour l’extinction de la petite vérole et s'attache, dès 1799, à propager la pratique de la vaccination contre la variole dont il est un des plus ardents propagandistes français avec Pinel, et avec l’appui du général Bonaparte. Des écoles et des régiments se font vacciner. Le clergé profite des prêches du dimanche pour encourager les fidèles à la vaccination.
Il établit en outre, un remarquable rapport sur les Bases de l’enseignement et de l’exercice de l’art de guérir.
Guillotin met en place sous le Consulat le premier programme cohérent de Santé publique en France à l’échelle de la nation (Lois de 1802 et 1803).

Les communes doivent à présent pourvoir à l'alimentation en eau potable des habitants et doivent dresser la liste des établissements “insalubres et dangereux” (parmi lesquels on trouve les boucheries, les équarrisseurs, les abattoirs, les manufactures de produits chimiques ou les mines, les tannages et teintureries). Les communes doivent également porter assistance aux pauvres et gérer les hôpitaux - d'où la nomination aujourd'hui encore du maire de la ville comme président du Conseil d'administration de l’ hôpital local - et distribuer des secours et des médicaments aux indigents. Les communes sont tenues d’avoir des médecins à leur service, chargés d’informer le préfet de l’état de santé de la population, des épidémies et des épizooties.
Par ailleurs la fin de l'Empire verra le début de l'utilisation des statistiques dans le domaine de la médecine.

Guillotin meurt, d’un anthrax à l’épaule gauche, à Paris le 26 mars 1814.